José De Broucker a effectué l’essentiel de sa carrière à La Vie dont il a été directeur de la rédaction. Cet ancien de Sciences Po et du CFJ (promo 1952) est aussi passé par Le Monde. En tant qu’enseignant, puis directeur des études de l’école de la rue du Louvre, il a formé des générations de journalistes. Il est aujourd’hui un fidèle supporter de La Cac. Gérard Marcout, qui fut son élève (promo 1970), lui donne la parole. Retrouvailles.


Comment avez-vous connu la Chance aux concours ?
Tout à fait simplement. J’ai toujours suivi assez fidèlement par les courriers, les bulletins, les imprimés, puis par le web, la vie du CFJ et plus particulièrement celle de l’Association des anciens dont j’ai été président deux fois. Je continue à m’intéresser vivement aux avatars variés et au développement constant de la maison. Le lancement d’un « programme concours » m’a paru être l’application enfin concrète de tentatives, de volontés, d’intentions d’équipes antérieures de l’association de développer l’accès diversifié à la profession et à l’école, mais qui n’avaient pas pu avoir de traduction concrète. En tout cas, pas aussi aussi articulée avec l’école. Je ne pouvais pas ne pas manifester mon intérêt et mon appui moral.

 

Comment cela s’est-il passé ?
A l’époque, cela fait quand même quelques années, je ne désespérais pas de pouvoir éventuellement apporter concrètement mon concours. Et puis, cela s’est avéré très bref et très court, finalement pas tellement pertinent parce que les temps ont beaucoup changé, moi pas forcément. Mais l’intérêt est resté et plus que l’intérêt… Si on peut aider et encourager, j’essaie de répondre par intérêt pour la vie de la famille CFJ-CFPJ dont je continue de faire partie mentalement.

 

Vous avez quand même participé. Les étudiants vous ont écouté avec beaucoup d’intérêt.
Je suis venu une ou deux fois pour une séance de travail. Je me souviens d’un jour où j’ai fait le questionnaire d’actualité. Je suis arrivé bon dernier ! Je reçois tous les appels à l’aide pour une séance. C’est gentil, cela me montre que çà vit. Mais je n’ai plus la disponibilité, la mobilité, je ne suis pas tout le temps résident à Paris, etc. Et aussi, je ne me sens pas au diapason. Mentalement oui, pour les principes oui, mais pour les travaux pratiques, je n’ai aucune prétention à avoir quelque compétence en matière de communication internet. Je ne m’en veux pas pour çà, j’en tiens compte.

 

Comment, selon vous, développer la diversité dans les médias ?
Pour capter des informations dans des sociétés de plus en plus plurielles, il faut avoir des aptitudes plurielles de captation des messages, de la communication, de ce qui se dit, de ce qui se pense dans les langages communs les plus variés des diverses populations.
De même qu’avec la démultiplication, la pluralité des lieux de réception, de destination des messages, la pluralité culturelle, il faut aussi, non pas seulement savoir entendre les langues multiples, mais aussi savoir les parler. Pour ma part, je n’ai pas su profiter de l’apprentissage de l’anglais pendant mes deux années du CFJ. J’ai peut-être eu 5 sur 20 à l’examen de sortie. Je ne comprenais rien. Je ne me souviens absolument de rien de ce que j’ai pu faire en anglais pendant mes trois ans à Sciences Po. Je m’en suis bien tiré, cela ne m’a pas empêché de faire un métier intéressant, mais je considère que c’est un handicap que j’ai trainé toute ma vie.

 

Quelle est alors la voie à suivre ?
Aujourd’hui, apprendre les langues, ce n’est plus apprendre des langues étrangères, c’est même de moins en moins utile. C’est apprendre les langues culturelles, socio-culturelles. Et cela ne s’apprend pas forcément dans les écoles. C’est avec des porteurs de cette socio-culture que l’on a des chances, s’ils sont vraiment faits pour la transmission, pas seulement pour la gravitation de leur propre socio-culture, cela ne serait pas intéressant. S’ils sont vraiment disposés, ils seront en tout cas de bons capteurs. Il faut ensuite qu’ils soient préparés à être traducteurs-transmetteurs, autrement ça ne sert à rien. Ils peuvent faire leur blog tout seul. Je n’ai rien contre. Il faut aussi des organes associatifs, de clubs, mais ce n’est pas de la communication plurielle, pluraliste. Si on se permet de donner accès aux techniques, aux pratiques de communication professionnelles à des gens de milieux d’expression socio-culturelle,  d’écoute et de langage pluriels, moi je suis pour. Cela me parait important, mais pour çà ! Pas pour faire bien à l’écran parce qu’il y a du « brun » ou du « peau rouge » !

Peu m’importe que le présentateur soit né dans le 9-3 ou à la Réunion ! L’important est de savoir qu’il y a dans l’équipe du journal télévisé des gens capables de capter ce que les sans-voix ou sans-capacités de communication du « 9-3 » doivent avoir d’intéressant à communiquer à l’extérieur.

C’est cela ma réflexion sur le bien-fondé d’une ouverture des accès à la formation professionnelle de  gens qui ne sont pas seulement, comme moi, des anciens de Sciences po, ou des intellectuels comme on dit bourgeois…