Étudiante de la promotion 2011 de La Chance aux concours, Adama Sissoko a un parcours atypique. Après un BEP, elle parvient à intégrer une hypokhâgne. Elle se prépare aujourd’hui à entrer dans une école de journalisme.


Son parcours scolaire ne prédestinait pas Adama, 24 ans, à passer les concours des écoles de journalisme. Pourtant, les 18 et 19 avril, elle était à Strasbourg pour se confronter aux épreuves du Centre universitaire d’enseignement du journalisme (CUEJ). Il y a quelques années de cela, elle était en BEP comptabilité-gestion à Bondy, en Seine-Saint-Denis.

« Hypokhâgne ? Je ne savais même pas ce que ça voulait dire »

Parce qu’elle perd pied pendant sa troisième, elle est orientée vers une filière professionnelle. « Une grosse claque », « une erreur de parcours » pour la jeune fille. Elle atterrit dans une classe difficile avec des élèves peu motivés, eux aussi arrivés là sans le vouloir. « Je me suis dit qu’il fallait que je travaille pour rattraper le coup et faire une première d’adaptation », se souvient-elle. Son professeur de français l’encourage et lui donne une liste d’ouvrages à lire en plus du programme. Un travail solitaire qui finit par payer : Adama intègre une première technologique (STT) à l’issue de ses deux ans de BEP.

Les disciplines littéraires, dont elle avait perdu le goût, provoquent un déclic chez elle. Elle se prend à rêver d’étudier la littérature à l’université. Autour d’elle, personne n’y croit vraiment : « On me disait qu’aller à la fac quand tu sors d’un bac technologique, c’est pas facile ». Mais elle s’accroche. L’année suivante, elle est en terminale et se découvre une passion pour la philosophie. Elle décroche un 18 au baccalauréat

Une nouvelle étape est franchie quand son professeur de lettres lui conseille de faire une hypokhâgne. « Je ne savais même pas ce que ça voulait dire », reconnaît Adama. Elle se renseigne. Elle découvre le programme très chargé, les cours de latin, la sélection drastique. Et quand elle en parle à ses autres enseignants, certains lui rient au nez : « Ceux qui sont en prépa, ils viennent de milieux aisés,  ils ont un bagage culturel et une grande culture générale », lui dit-on. Adama se lance, sans trop y croire. Pourtant, ça marche. Direction le lycée Jean Jaurès à Montreuil.

« J’étais là parce que j’aimais ça »

« Je sentais que j’avais trouvé ma place. Pendant le BEP et mes deux ans en STT, j’ai bossé des matières que je n’aimais pas et là, c’était génial. En même temps, c’était très dur parce que pour des choses très simples, j’ai senti que je n’avais pas le niveau. Un truc bête : la prise de notes, je n’avais jamais fait ça avant. »

A la fin de l’année, ses notes sont trop basses pour lui permettre de passer en khâgne et le redoublement est interdit. En principe, Adama doit poursuivre son cursus à l’université. Elle a pourtant fait des progrès énormes : avant-dernière au premier concours blanc, elle est quinzième au second. « A parcours spécial, mesures spéciales », estiment ses professeurs qui l’autorisent finalement à redoubler.

Sa deuxième hypokhâgne se passe mieux, ses notes sont meilleures et elle entre ensuite en khâgne où elle s’interroge sur son avenir. Une collaboration avec le journal municipal de Montreuil la met sur la voie. La rédactrice en chef apprécie sa façon de travailler et lui propose de devenir pigiste.

Son objectif est désormais d’intégrer une école de journalisme. Aujourd’hui étudiante de La Chance aux concours, elle croit en ses chances. Chaque semaine, ses camarades et elle se retrouvent en groupes de travail pour plancher sur l’actualité de la semaine. Elle apprécie tout particulièrement d’être encadrée par des journalistes bénévoles. Son conseil à ceux qui voudraient à leur tour passer les concours ? « Ne croyez pas que c’est inaccessible. Il faut de la force et de l’audace, mais c’est possible. »

Julien Massillon